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Interview de Philippe Thureau-Dangin, Directeur de la rédaction de Courrier International

Courrier International vient de fêter son 1000ème numéro… L’occasion pour Wellnews de revenir sur près de 20 ans de succès pour ce journal résolument différent en compagnie de  Philippe Thureau-Dangin, le Directeur de la rédaction de Courrier International.

Depuis octobre 2008 Président du directoire de Télérama, directeur de la rédaction de l’hebdomadaire Courrier International et, depuis novembre 2001, Président du directoire de Courrier international, Philippe Thureau-Dangin est titulaire d’une maîtrise de Philosophie et diplômé de l’Ecole supérieure de commerce de Rouen. Il a fondé en 1998 les Editions Exils, dont il est aujourd’hui le directeur général, et est également l’auteur de “la concurrence et la mort” publié aux Editions Syros Collection.

Dans un contexte difficile pour la presse, comment se  porte Courrier International ?

Courrier international se porte bien, malgré la crise. La diffusion est globalement stable. Et nous avons compensé le manque à gagner de la publicité par la création de nouveaux produits, par des numéros spéciaux, par la mise en route d’une boutique électronique, etc. Il est clair que Courrier international, qui fêtera ses 20 ans à l’automne 2010, est devenue une référence, une vraie marque, et qu’il est possible de diversifier ses activités. La seule limite que nous nous fixons, c’est de rester dans notre mission première, d’apporter le regard de la presse étrangère sur les différents thèmes de l’actualité.

Vous venez de fêter votre 1000ème numéro… A vos yeux,  comment a évolué la presse internationale au niveau du traitement de  l’information, du ton des journaux, de la liberté de la presse au fil des 20  dernières années ?
Il faut distinguer plusieurs régions du monde, trois au moins. Tout d’abord, les pays émergents. Au cours de ces 20 ans, dans des pays comme la Chine et l’Inde, les classes moyennes sont plus importantes, et la presse écrite “papier” a pris un essor formidable, avec des diffusions en hausse, et une indéniable professionnalisation des différents journaux. Bien entendu, les journalistes chinois ne peuvent pas tout dire, mais ils peuvent parfois repousser un peu les limites… C’est ce qui explique que malgré la crise, le nombre de quotidiens vendus dans le monde est en hausse. Second groupe : le tiers monde, où la presse n’a guère bougé. Souvent sans moyen, aux mains d’intérêts financiers ou du pouvoir, elle a du mal à faire son travail et à évoluer. Une grande partie des journaux africains proposent néanmoins des versions internet, afin de toucher la diaspora, ce qui est une démarche intéressante. Enfin, le monde dit développé. Là, la presse a considérablement changé, à cause des autres médias, télés d’infos en continu, internet, presse gratuite, etc. Les groupes de presse ont perdu de leur superbe et ont licencié. Pour faire face à la crise, les journaux ont innové, dans leur format, le rubricage, la hiérarchie des infos, l’équilibre images-textes. Certains journaux ne sont plus des “newspapers” mais des “viewspapers” qui donnent des points de vue et de la réflexion… Sur la question de la “liberté de la presse”, il ne me semble pas qu’elle ait beaucoup changé depuis 20 ans dans le monde dit développé : cette liberté s’arrête quand les conflits d’intérêt sont trop aigus ou que le journaliste lui-même décide de s’autocensurer.

Peut-on parler d’une mondialisation de l’information, d’une  certaine forme d’uniformisation à la fois dans les sujets traités et dans la  manière de les traiter ?
L’actualité est mondialisée, les grands titres sont souvent les mêmes d’un bout à l’autre de la planète, la photo choc d’une femme en pleurs ou d’un manifestant en sang va faire le tour du monde en quelques secondes et être reprise sur les unes des journaux et les pages d’accueil des sites. Cela dit, la diversité des traitements journalistiques existe toujours. Chaque pays ou aire culturelle a ses traditions en matière d’écriture et parfois de mise en page. Les points de vue sur l’actualité aussi divergent d’un continent à l’autre. En fait, face à la mondialisation économique, financière et technologique, il existe un mouvement inverse de particularisme, ou de résistance des traditions. Un article d’un journal arabe n’a rien à voir avec un article japonais ou un article français. Le premier joue sur la répétition, le second sur l’enveloppement et un certain impressionnisme, le troisième ressemble toujours un peu à une dissertation ou une copie de Sciences-Po !

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