• 17 janvier 2024
  • 3  min

Xavier Cornette de Saint-Cyr : « Stop à la marchandisation du bonheur ! »

À chaque nouvelle année, sa liste de résolutions… qui sont souvent abandonnées. Mais vous êtes-vous déjà demandé pourquoi ? Xavier Cornette de Saint-Cyr, auteur du livre Déjouer les pièges du développement personnel (Ed. Flammarion) revient sur les effets contre-productifs et culpabilisateurs de trop nombreuses injonctions au bonheur.

En quoi certaines injonctions peuvent-elles être contre-productives ? Lesquelles doit-on arrêter d’utiliser ?

Le principal écueil de notre société est de « marchandiser » le bonheur, d’en faire une valeur marchande qu’il faudrait absolument posséder. Pourtant, nous avons tous le droit de ne pas aller bien, et c’est même le propre de l’humain : nos vies ne sont pas linéaires, nous traversons des jours avec et des jours sans, le bonheur n’est pas accessible en permanence et dieu merci ! Encore trop d’entre nous se sentent coupables de ne pas atteindre cet idéal, voire anormaux lorsqu’ils se comparent à d’autres. Mais pour ce faire, encore faudrait-il parvenir à définir ce qu’est le bonheur. Or, cette perception varie énormément d’une personne à l’autre. Les injonctions les plus culpabilisantes sont celles du type « Ce qui ne vous tue pas vous rend plus fort », « Essaie de positiver », ou encore « Aimer d’un amour inconditionnel ». Pour la première, si certaines épreuves nous renforcent et nous enrichissent effectivement, d’autres peuvent nous fragiliser, nous affaiblir, voire nous détruire. Tout dépend du vécu de chacun. Pour la deuxième, arrêtons d’essayer de voir le positif partout, d’être optimistes à tout prix. Comme toujours, le juste équilibre se trouve au milieu : la vie est faite de nuances, et il est important de les respecter. Pour la troisième, il est absurde de dire que l’amour n’a pas de condition, puisque la principale reste tout de même de respecter l’autre !

Comment expliquer le succès du développement personnel ? Quels sont ses pièges ?

La tendance de la décroissance et de la « slow life » prouve que nous arrivons à bout du consumérisme à outrance, et que nous avons compris qu’il n’allait pas nous rendre plus heureux. Alors que nous avons tous besoin de donner du sens à notre existence, il est très facile d’adhérer à des principes qui sont censés répondre à ce besoin, en donnant une marche à suivre pour réussir. Mais cette approche implique que si nous échouons malgré ces conseils, c’est que nous sommes incapables. Le principe du développement personnel est intéressant et beau, il aide à se créer et à se déployer soi-même, mais encore faut-il qu’il soit transmis par des personnes qualifiées. Aujourd’hui, cette tendance est devenue une usine à gaz, et dans les livres liés à cette thématique, on trouve tout et son contraire. Certains auteurs sans formation parviennent à vendre en s’adressant aux émotions de leurs lecteurs, mais il faut garder en tête qu’une recette de cuisine pour une existence parfaite, ça n’existe pas, et que jouer avec le psychisme des gens peut avoir des conséquences négatives.

Comment en tirer le meilleur parti ?  

On peut commencer par avoir quelques connaissances en philosophie ou en psychologie : pas de façon poussée mais par exemple en lisant des livres de vulgarisation, comme ceux de Boris Cyrulnik ou Christophe André (ou même les miens). Ils permettent de mettre les choses en perspective, de prendre le recul nécessaire face à la théorie et de revenir au concret. Ces auteurs mettent à notre portée des notions complexes comme le fonctionnement du cerveau. Mais surtout, ils respectent leur lecteur, et c’est ce qui change tout. Plutôt que de dire « Voici la recette du bonheur, et vous êtes mauvais si vous n’y arrivez pas », ils choisissent de dire « Voici une solution, essayez-là et jugez si elle est adaptée à votre situation ». Et effectivement, rien n’est obligatoire : il s’agit d’adopter ce qui résonne chez nous, car il n’y a pas de vérité unique. C’est pourquoi l’éthique de l’auteur est fondamentale.

Comment se fixer des objectifs plus réalistes ?

Un objectif réaliste est pragmatique et adapté au réel : il peut être mis en œuvre concrètement. Mais par-dessus tout, c’est un objectif qui correspond à ce que l’on souhaite profondément, et pas à ce que les autres souhaitent de nous ou pour nous ! Il est important de se respecter et d’être indulgent avec soi-même. Se fixer des objectifs qui ne correspondent pas à nos goûts personnels, c’est la garantie de ne pas les tenir ! Comme par exemple, prendre la résolution d’aller à la salle de sport deux fois par semaine alors que l’on déteste le sport… Le plaisir reste le moteur de tout engagement : si nous faisons quelque chose par plaisir, ce n’est plus une corvée ni une obligation mais un choix personnel. Il faut s’engager dans un projet par envie, et non pour se débarrasser de quelque chose. En psychologie, on dit que pour trouver la motivation, nous avons besoin de réunir deux notions : « aller vers » et « s’éloigner de », mais la première doit rester majoritaire. N’oubliez jamais de vous faire plaisir, car si on veut avoir quelque chose à offrir à autrui, il faut d’abord s’offrir à soi-même. C’est du bon sens, mais si on n’a rien, on ne peut rien donner à l’autre ! Pour toutes ces raisons, prendre soin de soi et être bien dans sa peau est indispensable pour rester une personne agréable.

Pour en savoir plus sur Xavier Cornette de Saint-Cyr : https://xavierdesaintcyr.com/ 

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